Dès le sas de départ, je me retrouve séparé de mes coéquipiers. Stane et Ch'tophe sont dans le sas des prioritaires. Dan et Yvan ne m'ont pas suivi dans le "sas du bas" (celui qui est près des arbres... c'est plus pratique pour faire son petit pipi d'avant course
). Bizarrement, tout le monde est dans le sas du haut, du coup je me retrouve très proches de la barrière de départ.
Dès que les "prios" s'élancent, on sent une tension dans le groupe, quelques sarcasmes (et plus si affinités) fusent à l'adresse des deux Ciotadains qui attendent sagement qu'on leur donne l'autorisation de partir.
Allez, top départ!!! Je pars dans les premiers non-prios, et dés la descente vers le Rd Point de la piscine de Luminy, je suis déjà à fond, prenant pas mal de risques en zigzaguant, en empiétant sur la voir de gauche... mais je sais que ce n'est qu'à ce prix que je me retrouverait dans les "bonnes roues". Au Rond point de Luminy je déclenche mon chrono, et j'avale la portion de Vaufrèges sur le grand plateau à des vitesse hallucinantes (30 Km/h là où je suis à 18-20 d'habitude). Je conserve ce braquet de mammouth jusqu'au second virage de la Gineste, doublant pas mal de monde (dont des prios). A mi-Gineste j'ai un point de côté qui m'oblige à mouliner davantage, avant de relancer vigoureusement sur la dernière portion de faux plat, ce qui me permet de basculer avec un bon petit groupe (entre temps, dépassé Stane, sans m'en apercevoir... l'inconvénient d'avoir tout le monde en maillot blanc des Bosses).
Dans la descente, je reste à l'abri pour récupérer. Au loin, nous voyons la tête de course (avec la voiture ouvreuse). A l'approche du plongeon sur Cassis je prends la tête du groupe histoire de faire la descente sans être gené. Avec 2 gars nous nous relayons jusqu'au pied de Belle-Fille. A cet instant, ma moyenne horaire des de 35,5 Km/h (32 Km/h l'an dernier!). Je me dis que je suis parti un peu vite, donc je m'efforce de gérer sans trop me faire distancer. En fait, cette côte sera à l'image de toutes les autres : moins bon grimpeur que les autres, ils me prennent une centaine de mètres dans le "dur", et je m'arrange pour mettre du braquet sur le final pour basculer avec eux. A 500m de Belle-Fille, je double un gars qui a 2 jambes artificielles en carbone... putain, chapeau mec!
Descente vers La Ciotat, un petit groupe "intéressant" est 50 mètres devant moi, je les reprends dans le 1er enchainement rapide droite-double gauche-droite et me cale dans les roues. Je resterai planqué sagement jusqu'au pied de Ceyreste. Là, mon compteur indique encore plus de 34 Km/h. Sur le bord de la route, j'aperçois un 1er incident, un cycliste qui s'est pris dans la roue... la chaine antivol d'une moto!!! Les boules!
La montée de Ceyreste est clairement le terrain qui m'est le moins favorable. Gros %, ça ne pardonne pas quand on emmène 92 Kg sur la selle. Là encore, je gère la partie dure (jusqu'au ravito), et profite des portions plus planes et des lacets pour refaire mon retard. A 500m du sommet, à 27-28 Km/h et avec l'aide de 5-6 mecs, nous revenons sur un gros groupe qui se forme au Grand Caunet.
Je reste dans les roues sur le plateau de La Bégude. Il y a quelques mecs qui roulent fort devant, dont 2 gars de Sanary, et une féminine "crevette" (la n°22) sacrément efficace avec des jambes aussi épaisses que mes bras. ça relaie pas mal, et comme j'ai un peu récupéré et me sens en forme, je participe à l'effort collectif. Dans l'espoir d'un hypothétique retour sur Ch'tophe, mais aussi pour me placer avant la descente vers Cuges. La tête dans le guidon, en position aéro, je ne donnerai pas le moindre coup de frein, prenant (avec le recul) des risques inconsidérés. J'en oublie parfois qu'un vélo n'a pas l'adhérence d'une moto
... il semble d'ailleurs qu'il y ait eu un gros crash à Cuges). En tout cas, à l'arrivée au village, je suis en 2è position du groupe derrière un Sanary-Boy. Sur un mini faux plat nous creusons même un trou conséquent sur le reste du groupe (30, 40, 50 personnes... j'en sais rien, me suis pas retourné assez longtemps pour compter), mais nous décidons de les attendre. Leur aide me sera précieuse dans l'ascension rapide (tout sur le grand plateau et à plus de 25 Km/h) du col de l'Ange (où une dame semble s'être fait mal en tombant das le fossé). Là haut, je cherche la grande silouhette de Stef qui me crie "Joël, il est pas loin, il est pas loin!!!". Du coup, je reprends la tête du groupe je à nouveau je fais la descente à fond! Sur le bord de la route, il semble y avoir eu un petit accident : 2 voitures sont arrêtées en warnings, et un vélo a "la roue en 8". Mais je n'ai pas le temps de m'attarder, je me cale derrière une Skoda Fabia en lui gueulant dessus "plus vite, plus vite!!!!". Je poursuis l'effort en solitaire et en "trainant la caravane" presque tout seul jusqu'au ravito de Gémenos. En effet, connaissant Ch'tophe je sais que c'est là mon seul espoir : qu'il s'arrête au ravito et se retrouve isolé!
Quand j'arrive au ravito... personne! Moi, je dois m'arrêter pour faire de l'eau en tout cas. Je dois être le premier de la journée à le faire, ils ont l'air surpris
Le groupe qui me suivait ne m'attend pas en tout cas. En me rendant mon bidon, la jeune fille me dit "allez, il faut les rattrapper". Je lui réponds avec un sourire carnassier "je vais les bouffer"
Bon, maintenant faut le faire. Un petit sprint et je les reprends juste au pied du col de l'Ange, que je grimperai dans les roues. Au sommet, Stef me tend un bidon... que je refuse, pas de bol je viens juste de remplir le mien
Et il me crie "il est à moins de 2 minutes!". Alors "IL", évidemment, c'est Ch'tophe. Parti en prioritaire, bénéficiant des meilleures roues, il est désormais presque accessible. Avec mon petit groupe d'une vingtaine de coureurs (les autres ont bifurqué versles grands parcours), nous montons rapidement la côte des Bastides. Les 5-6 meilleurs grimpeurs s'échappent dans la première partie et rejoingnent 2 coureurs isolés qui étaient devant. Profitant de la descente de ND des Pieds-noirs puis du faux-plat montant qui suit, je parviens à basculer au sommet avec eux et... quelle n'est pas ma surprise : Ch'tophe est là, dans mon groupe. Nous l'avons repris!
Une petite tape amicale sur la fesse gauche histoire de lui signaler ma présence, puis nous faisons la descente côte à côte jusqu'à l'embranchement vers Roquefort. Là sur cette route sinueuse, je préfère être seul en tête pour pouvoir mieux négocier ces virages aveugles. Faut dire que je la connais par coeur cette route, elle fait partie de mon "circuit étalon" que je fais 20 fois par an!!! Du coup, je peux entamer la remontée vers La Bédoule avec quelques mètres d'avance, comme la semaine dernière
Le groupe se reforme vite mais on sent que tout le monde a les jambes dures, car personne n'ose vraiment attaquer. Le revers de la Gineste fait peur. A l'amorce de la descente sur Cassis, je me positionne à nouveau en tête. Sans trop réfléchir, car maintenant que j'ai Ch'tophe dans la roue, ce n'est pas forcément une bonne tactique. Mais j'ai les jambes qui crient tellement fort que je n'entends plus mon cerveau
. Un petit merci au passage au cycliste non engagé sur la course qui m'a pris les relais sur la portion rectiligne entre la garde de Cassis et le pied de la Gineste.
Nous y voilà, le juge de paix : le revers de la Gineste. Si Ch'tophe me distance, il gagne. Si je l'accroche, ça se finira au sprint... ou main dans la main. On n'imagine pas d'autre issue. Dès le pied du col, Ch'tophe semble plus facile. Mètre par mètre, il creuse un écart. Incapable de me mettre en danseuse, je mouline et essaie de limiter les dégats. Sur le final, j'envoie du braquet pour récupérer quelques coureurs, qui me ramenent sur Ch'tophe à Carpiagne. Un petit vent s'est levé, du coup le reste de l'ascension se fait groupé, personne n'osant affronter le vent, excepté un triathlète puissant mais téméraire qui reviendra vite dans les roues.
Sommet de la Gineste, terminus, tout le monde descend!!! Certains mieux que d'autres
En fait, c'est sur cet improbable terrain, la descente, que Ch'tophe va céder. Bien qu'ayant basculé avec quelques mètres de retard, en prenant les virages serrés à vitesse plus élevée que la plupart des autres gars, je rejoins la tête du groupe alors qu'une petite cassure s'est formée. Irrémédiablement. Quand je me retourne à Vaufrèges, il n'y a plus personne derrière moi. On dirait que la "course du VCM" est jouée
Le final est classique... tous groupés dans le faux plat, entrée dans la fac de Luminy, à 200m de l'arrivée un gars accélère (il finira juste derrière moi), le triathlète aux cuisses de pilier le contre, j'essaie de prendre sa roue mais j'ai les cuisses et les mollets en feu... je m'incline et ne finirai que second de ce peloton.
Quand je passe la ligne, le chrono indique un temps inespéré de 2h48 et des brouettes... moi qui tablais sur un 3h10, c'est assez inespéré. Ch'tophe est juste derrière, et me félicite sportivement. Je peux le remercier aussi... sans l'émulation entre nous, lui le chassé, moi le chasseur, et inversement dans le revers, nous aurions dans aucun doute mis 10 ou 15 minutes de plus!
A l'arrivée, affalés comme des clodos, nous attendons nos équipiers qui arrivent les uns après les autres, avant d'aller manger sous la tente. A cet instant, je ne rêve que de 2 choses : une douche, et une sieste